Il y a une vingtaine d’années, j’ai eu la chance de me rendre en Israël et je me suis rendu dans la région de Tabgha, près du lac de Genesareth (l’autre nom du lac de Tiberiade). J’ai donc vu les paysages que Jésus a vu, j’ai posé mes pieds là où, sans doute il a posé les siens.

C’est sans doute pourquoi je trouve que cet Evangile est proche et concret : il se déroule dans des lieux que l’on peut voir et toucher.

Mais il est aussi facile et concret parce qu’il présente une situation que chacun de nous est à même de vivre : aujourd’hui, il nous parle d’une rencontre, d’un appel, et d’un groupe de pécheurs qui décident de prendre leur vie en main parce qu’ils ont rencontré quelqu’un qui marque tout leur être en profondeur.

Et ça, ça nous intéresse intensément parce que, au delà des difficultés et parfois des grandes lassitudes que nous éprouvons dans notre quotidien, nous aspirons à être des Vivants, à nous mettre en route, en route pour une aventure extraordinairement féconde (exactement comme le symbolise cette pêche) ; une aventure qui enthousiasme en profondeur, qui prend tout entier et nous brûle d’un désir de vie.

Bref : nous aspirons à exister comme des fous !

L’exemple concret de Simon, de Jacques, de Jean et des autres qui décident de suivre Jésus nous montre concrètement deux choses :

Premièrement : Il y a une « méthode Jésus » pour nous guider, doucement mais sûrement, vers le bonheur.

Deuxièmement : Chacun de nous est appelé à une aventure qui lui est propre, qui tient compte de ce qu’il est ; chacun de nous a une vocation spécifique, une vocation personnelle qu’il est bon de découvrir.

 

1/ La « méthode Jésus » est simple :

En premier lieu écouter.

Ecouter la parole de Dieu, écouter l’enseignement de Jésus. Ce que dit Jésus est capable de toucher profondément et avec force, là où chacun a besoin d’être touché. Ce sont ces paroles qui amènent la foule à se presser autour de Lui. Et aujourd’hui encore, on voit le même phénomène : il y a des centaines de lieux en Asie, en Afrique, en Australie et en Amérique, où près de 40.000 personnes se rassemblent chaque dimanche pour prier ensemble et écouter cette Parole qui fait vivre.

La Parole de Dieu, par la bouche de Jésus, c’est LA porte d’entrée du chemin vers le bonheur. Cette parole qui touche au cœur amorce un mouvement de confiance parce qu’elle sonne juste dans la vie de celui qui la reçoit.

La deuxième étape de la « méthode Jésus », c’est avancer au large et jeter les filets.

C’est-à-dire déployer la Parole reçue, permettre à cette Parole de faire son œuvre dans les recoins de notre être. C’est avoir confiance et croire que cette Parole nous veut du bien.

Pour avancer au large et jeter les filets, nous avons besoin d’un guide, de quelqu’un qui nous donnera l’impulsion, nous indiquera où jeter les filets et orientera notre fécondité ; quelqu’un qui donnera à notre pêche sa pleine dimension, celle de prendre des hommes dans ce filet de vie.

La troisième étape nous appartient : elle consiste à accueillir l’expérience que nous venons de vivre et à prendre une décision en cohérence avec cette expérience.

C’est lorsqu’ils prennent conscience de la fécondité inouïe qu’ils peuvent vivre avec cet homme étonnant que les disciples laissent tout et décident de suivre Jésus. Lorsque je vois que je suis fécond, j’en suis profondément heureux ; je désire l’être encore plus et je m’attache à celui qui m’a permis de l’être.

Oui, nos actes, nos vies, lorsqu’elles sont animées par cette rencontre avec le Christ, ne sont plus jamais stériles.

Et cet élan, ce désir de fécondité est communicatif : « ils capturèrent une telle quantité de poissons »… « Ils firent signe à leurs compagnons de l’autre barque de venir les aider ». Je désire que d’autres expérimentent ce même bonheur, cette même fécondité.

 

2/ Oh, la « méthode Jésus » ne nous demande pas de jouer les héros. Regardons Simon-Pierre : Jésus lui a simplement demandé s’il pouvait monter dans sa barque ; Simon Lui a offert ce service et en a été transformé. Il n’y a aucune recherche de performance ici, mais simplement une réponse à un tout petit appel qui lui été formulé.

Et c’est l’autre point que nous montre cet Evangile : il nous montre que chacun de nous a une vocation personnelle et qu’elle est toute simple.

Lorsque je parle de vocation, je ne parle pas spécialement de regarder la forme que ma vie doit prendre (typiquement : est-ce que je dois me marier ou est-ce que je dois me diriger vers une vie religieuse ?) ; il s’agit ici de découvrir le lieu où je suis attendu par l’Esprit Saint, tel que je suis, pour être fécond à chaque instant de ma vie. Il s’agit d’écouter le Seigneur nous guider vers les lieux où nous serons de « bons pêcheurs ».

D’abord, il faut retenir qu’on peut être un bon pêcheur même sans « tout laisser ». Lorsque l’Evangile dit « laissant tout, ils le suivirent », il ne dit pas « laissant tout pour le suivre » ; l’important n’est pas de « tout laisser » ni de regarder ce qu’on abandonne, l’important est de suivre Jésus. Une jeune fille qui part suivre son mari au bout du monde ne dit pas tout le temps : « vous savez, j’ai tout abandonné », mais elle crie : « je l’aime ! ».

Jésus a demandé à Simon de persévérer, de dépasser la fatigue et la déception de n’avoir rien pris après avoir peiné toute une nuit. Il lui a demandé d’espérer et de jeter à nouveau les filets.

Et voyant que cette confiance et cette docilité portait du fruit, Simon s’est lancé dans l’action, il a fait signe à d’autres de venir l’aider à remonter les filets.

La vocation personnelle de Simon Pierre, c’était d’être à l’écoute, d’être prêt à se mettre au service, d’être celui qui se met au service de la confiance.

Et nous, quelle est notre vocation personnelle ? Où suis-je attendu pour susciter une telle pêche féconde ? Où suis-je attendu pour contribuer à remonter le filet lorsqu’il est plein ?

Comment prendre les hommes dans le filet d’amour de Dieu, ce merveilleux filet tissé de liens d’amour, bariolé de la diversité de nos gestes, de nos mots, de nos vies, ce filet salutaire qui nous tire de la mort que les eaux profondes symbolisent dans cet Evangile ?

Nous ne voyons pas assez toutes les « bonnes pêches » de nos vies : toutes ces petites phrases et ces gestes fraternels qui, parce qu’ils trouvent leur source dans ce que chacun de nous EST vraiment et parce qu’ils sont initiés avec l’aide de l’Esprit Saint reçu au baptême, ont la capacité de transformer une vie, d’initier une conversion, une mise en route, de réveiller et même de ressusciter ce qui semble mort et desséché.

Ma vocation, ce peut-être d’accueillir l’autre, que ce soit par ma chaleur humaine réconfortante ou simplement par un accueil sans jugement de ce qui peut m’être confié.

Ma vocation, ce peut être d’être porteur de paix, de diffuser la joie autour de moi, de consoler, d’être vecteur de réconciliation, de gratitude, de vérité, d’aider l’autre à se remettre en ordre, d’apporter de la sécurité, …. parce que cela vient du plus profond de moi-même, là où la rencontre avec le Seigneur a pu me toucher.

Oui, Seigneur, montre-moi quelle est ma vocation personnelle. Montre-moi où je peux jeter mes filets.

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