Vous l’avez senti ? Est-ce que vous l’avez senti ? Non mais attendez, on le sent depuis ce matin ! Vous n’avez rien vu ?? Mais ce tremblement de terre !! C’est le Christ qui se prépare à se manifester au grand jour !

Rendez-vous compte de ce qu’il se passe : Il vient de passer toute la journée avec les morts ! Ceux qui sont aux « enfers ». Il est « descendu aux enfers ».

Attention, on va tout de suite lever une ambiguïté : il s’agit des « enfers », pas de « l’Enfer ».

L’Enfer, c’est le lieu des damnés, c’est à dire le lieu où se trouvent ceux qui, de leur propre choix, se sont rendus inaccessibles au pardon. C’est un choix tellement profond, c’est un refus de Dieu d’une portée tellement cosmique, qu’on imagine que c’est rare. Et honnêtement, il est impossible de vraiment savoir s’il y a ou non des personnes en Enfer… Soyez rassurés, on le saura un jour et on n’est jamais à l’abri d’une bonne surprise…

Aujourd’hui, Jésus est descendu « aux enfers », c’est à dire qu’il est allé visiter le monde des morts au sens large. Un monde où plus rien ne peut nous atteindre, ni les bonnes, ni les mauvaises choses. C’est plutôt un lieu de vide, un lieu où n’existe aucune relation, un lieu de solitude, et même le lieu de la solitude ultime et, la plus radicale. Dans le monde des morts, avant que Jésus ne s’y présente, on avait beau crier de détresse, personne ne répondait. On s’y sentait totalement abandonné.

Donc Jésus a passé toute la journée à apporter l’espérance au monde des morts : il y est allé, mais ne s’y est pas trouvé enfermé comme les autres morts ; il a ouvert la porte de sortie. Et désormais la mort ne conduit plus à l’abandon : si après notre décès nous suivons Jésus, si nous nous accrochons à Lui, nous traverserons ce monde de solitude et nous en ressortirons (à moins de décider nous-mêmes d’y rester) car nous serons dans une relation d’amour, une relation indéfectible, avec quelqu’un : le Christ !

Jésus commence par annoncer aux morts sa victoire sur toute mort, mais, et c’est maintenant, il va l’annoncer partout et à tous, avec notre collaboration. Regardez ce qui se passe dans l’évangile de ce soir : les femmes se rendent près du tombeau et là, un ange apparaît devant elles et commence par leur dire : « hé les femmes ! allez dire aux disciples ce qui se passe ».

Puis c’est le tour de Jésus de leur dire : « allez annoncer à mes frères qu’ils doivent se rendre en Galilée. C’est là qu’ils me verront »

Jésus s’est occupé de se présenter lui-même vivant à ceux qui sont morts ; désormais il compte aussi sur nous pour montrer à ceux qui sont encore en vie qu’il ne faut plus craindre la mort puisqu’Il l’a traversée et qu’Il est à nouveau vivant !

A qui les disciples de Jésus doivent-ils annoncer cette libération qu’offre la résurrection ? Pas au temple, pas qu’aux juifs. Mais en Galilée !! C’est à dire là où se trouve tout ce que les juifs regardent avec condescendance. Là où on parle hébreu avec un accent à couper au couteau… Là où se trouvent juifs et non-juifs. La Galilée, c’est le carrefour des nations ! Là-bas, c’est le bazar, là-bas on rencontre la variété de l’humanité dans son côté le plus brut.

C’est pourtant là qu’on le verra, c’est là qu’il nous attend, comme une lumière au milieu de la nuit la plus noire et la plus confuse.

En réalité, nous sommes nous-mêmes chaque jour en Galilée. Cette Galilée aujourd’hui, c’est notre monde ! Pas seulement notre petite assemblée de catholiques, mais notre voisinage, notre bureau, notre famille, notre pays et tout ce qui s’y vit ! Si nous voulons retrouver celui qui ravive ce qui est mort, si nous voulons voir Jésus, c’est là qu’il faut aller !

C’est au contact de ces hommes et de ces femmes que nous croisons au gré de notre quotidien, c’est au contact de tous ceux qui, comme nous, ont soif de lumière dans leurs ténèbres, qui ont soif de cette joie d’espérer, qui ont soif d’être rejoints et d’avoir la certitude d’être vraiment aimés pour eux-mêmes, c’est au contact de nos enfants, de nos parents, parce que là aussi l’amour et la vie a besoin d’être présent.

La Galilée, ce sont tous ces lieux qu’affectionne Jésus, parce qu’ils ont le plus besoin de voir sa lumière. Ces lieux de solitude, de peur, de tristesse, de désespoir, de colère, de guerre. Ces lieux où règne la mort parmi les vivants.

A nous d’annoncer et de montrer notre foi en cette présence vivante du Christ à chaque moment de notre vie et pour toujours. Plus jamais nous ne serons seuls ni orphelins. Dieu s’est lié à nous, de manière indéfectible. Tout comme l’eau se mêle au vin… Tout comme il est impossible de séparer dans notre être notre humanité de la part divine qui nous est offerte depuis notre baptême.

Ce soir, c’est donc le premier jour du reste de notre vie. Une vie renouvelée, accompagnée à chaque instant par un ami qui ne fera jamais défaut, une vie dans le monde qui nous entoure, dans les frictions autant que dans les profondes communions. La résurrection de Jésus nous montre quelque chose de simple : la vie éternelle est déjà commencée. Nous avons commencé à la vivre.

Une vraie question qu’il nous faut nous poser maintenant, ce n’est plus celle de savoir si le Christ est ressuscité ; ce n’est plus de savoir si la mort est la fin de tout. La mort n’est plus qu’un passage. Une vraie question désormais, c’est celle que pose une belle figure spirituelle du siècle dernier, Maurice Zundel : « Le vrai problème n’est pas de savoir si nous serons vivants après la mort, mais si nous serons vivants avant la mort. »

Si nous croyons que rien n’est jamais perdu, rien n’est jamais fini, rien n’est jamais trop tard, si nous comprenons que la mort ne peut désormais garder personne en son pouvoir, qu’elle n’est qu’un passage et que TOUT peut ressusciter, quel que soit le moment de notre vie quotidienne, que la situation soit simple ou désespérée, qu’on vive dans une abbaye silencieuse ou dans le tumulte de Barbès, qu’on soit athée, musulman, drogué, BCBG, gay, gouine, pauvre ou riche, pape depuis longtemps ou tout jeune baptisé comme Mathieu ce soir, alors nous avons de multiples occasions de ressusciter et de sortir des petites morts dans lesquelles nous pouvons tomber.

Toute notre vie sera insuffisante pour épuiser tous les moments de résurrection que nous pouvons traverser ou susciter : pardonner, persévérer, accueillir. Regarder l’autre et reconnaitre son existence plutôt que le laisser invisible. Rechercher ce qui est bon, beau et bien en l’autre et l’aider à faire jaillir ce qui est bon en lui. Poser un nouveau pas dans notre vie après des violences, après des déconvenues, des blessures ou une épreuve, tout cela forment des mouvements de résurrection et des mouvements qui incitent l’autre à se remettre en vie. Alors, ce soir, goûtons sans limite cet appel à la résurrection, au renouvellement de notre vie. Goûtons pleinement cet appel à avoir confiance en la vie : Jésus le Seigneur nous y précède et sera TOUJOURS, toujours, avec nous.

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