En décembre dernier, nous avons vécu un dîner de Noël entre paroissiens. Il y avait des familles, des couples dont les enfants passaient Noël dans leur belle-famille et qui étaient seuls ce soir là. Il y avait des célibataires. Il y avait des personnes de tous âges. Nous avons passé une très belle soirée…

Qu’étions-nous venu chercher ce soir-là ?

Simplement manger un bon repas ? Trouver un moyen de remplir une soirée d’ennui, à défaut d’autre chose ? Cherchions-nous un moyen de combler facilement notre besoin du moment ?

Ou bien cherchions-nous autre chose de plus profond ?… Chacune des personnes présentes a sa propre réponse et sait si ce repas y a répondu.

Il en est un peu de même pour ce que nous dit le Seigneur aujourd’hui.

Au travers de la 1ère lecture et de l’Evangile, nous sommes en présence de 11 guérisons de lépreux. Toutes semblent d’une facilité déconcertante : pour Naaman, grand général syrien, il suffit de se plonger docilement dans le Jourdain pour être guéri… ; les 10 lépreux, quant à eux, ont simplement eu à se mettre en marche et à suivre l’ordre de Jésus « allez vous montrer aux prêtres » (car selon le livre du Lévitique, seuls les prêtres pouvaient acter d’une guérison chez quelqu’un).

Et apparemment toutes sont des guérisons radicales ! Quand on souffre d’un mal comme la lèpre et qu’on en est soulagé, il y a évidemment de quoi être heureux et on pourrait s’arrêter là…

Or, que voit-on de plus :

Naaman est guéri mais il a aussi manifestement fait une découverte qui a bouleversé sa vie : « je le sais désormais : il n’y a pas d’autre Dieu, sur toute la terre, que celui d’Israël » ; « Je ne veux plus offrir ni holocauste ni sacrifice à d’autres dieux qu’au Seigneur Dieu d’Israël. »

Il y a quelque chose de radical dans ces proclamations. Naaman a découvert quelque chose de fondamental pour lui.

Quant au lépreux samaritain, son attitude (sa joie, sa gratitude, sa louange) laisse entrevoir qu’existait en lui un désir plus profond encore auquel Jésus répond sans même qu’il soit expressément formulé.

La Parole de ce jour va donc bien au delà d’une simple satisfaction d’un besoin physique, aussi important soit-il.

Dans cet évangile, Jésus ne veut pas se réduire à un rôle de simple guérisseur. Il veut aller plus loin, plus profond, toucher à l’existentiel, à ce qui nous fait vivre.

Il dit au samaritain qui revient vers lui : « Relève-toi ; ta foi t’a sauvé. » Plus encore que d’être guéri, l’important est donc, semble-t-il, d’être sauvé

Oui mais alors, être sauvé, c’est quoi ?

On entend et on apprend que Jésus est venu « pour nous sauver »… Mais de quoi m’a-t-il sauvé au juste ?! On dit : « il est venu pour nous sauver du péché ». Qu’est ce que cela signifie pour moi ?! En définitive, ça veut dire quoi pour moi « être sauvé » ?

La Parole de ce jour nous apporte un exemple de réponse.

Je vous invite à fermer les yeux un instant… Mettons-nous, l’espace d’un instant, dans la peau d’un de ces lépreux.

Regardons-les. Imaginons notre corps abîmé par la lèpre, imaginons ce délabrement extérieur, imaginons cet isolement, ce mal social, cette mise à l’écart… Entendons ce cri : « Jésus, maître, prends pitié de moi. »…

Regarde-moi Jésus : je suis laid, je pourris sur place, la mort est là ; ça sent le moisi, le renfermé en moi et hors de moi.

Je suis seul, isolé, rejeté. Je n’ai pas de place. Je ne suis pas regardé. Je ne suis pas désiré. J’aimerais que quelqu’un me regarde, me réconforte, me parle. Qu’on me montre que j’ai du prix pour quelqu’un.

J’aimerais être rétabli dans mon humanité.

Voilà ce qu’est, peut-être, la prière du lépreux…

Guérir, oui, c’est évidemment ce que désire un lépreux, et manifestement Jésus y fait droit dans l’évangile pour ces 10 personnes. Toutefois, même si on ne sait pas vraiment ce qu’il advient des 9 autres, seul 1 seul revient, joyeux, louant Dieu.

Celui-là est guéri comme les autres ; mais il manifeste bien plus : c’est exubérant, c’est profond, c’est une libération pour lui ! Par ce geste où il rend grâce, c’est comme s’il faisait le geste d’ouvrir les volets et la fenêtre de son être pour permettre au soleil et à l’air frais de pénétrer, éclairer et purifier l’intérieur. C’est un allègement. C’est beaucoup plus qu’un ravalement de façade ou que des fissures rebouchées : c’est un assainissement profond.

Jésus est venu pour cela, pour cet assainissement profond. Il est venu donner la vie, la remettre en route lorsqu’elle est anesthésiée ; il est venu permettre à la vie de circuler à nouveau.

Et quand on voit sa déception de ne voir qu’un seul des 10 lépreux revenir sur ses pas pour rendre gloire à Dieu, il montre qu’il est venu pour chacun, pour le samaritain et pour chacun des 9 autres, en acceptant la possibilité que l’on refuse ou qu’on reste indifférent.

Ainsi, Jésus est venu pour me sauver. Il est venu pour me sauver de ma lèpre profonde, de ce qui m’empêche d’être pleinement vivant, de ce qui entrave ma vie et m’empêche de devenir l’homme ou la femme que je suis appelé à être.

La vie à laquelle chacun de nous est appelé, c’est celle qui répondra à notre désir profond de relation avec quelqu’un qui nous aime de manière infinie, débordante, personnelle et inconditionnelle. C’est cette vie là que Dieu veut pour chacun de nous.

Mais moi, est-ce que j’ose le désirer ? Est-ce que j’ose croire que c’est vrai

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