Il y a un peu plus de 6 ans, j’ai été ordonné diacre. Parce que j’étais marié, l’évêque a commencé la célébration de l’ordination en demandant à mon épouse Astrid si elle était bien d’accord avec ce qui allait se passer. Et j’aime tout particulièrement la façon dont cette question est posée : « Acceptez-vous tout ce que le diaconat que votre mari va recevoir apportera de nouveauté dans votre couple et votre vie de famille ? ».

Quelle confiance en l’avenir, en Dieu, en l’Eglise, en son mari aussi, lorsque l’épouse répond « oui » : elle se jette littéralement dans le vide une seconde fois (la première c’était le jour de son mariage), elle se lance sur un chemin définitif et sans retour possible : elle accepte par avance, sans connaître le détail de l’avenir, tout ce qui sera désormais nouveau dans sa vie quotidienne. (Merci à Astrid d’avoir répondu « oui »).

Eh bien il me semble qu’on peut poser la même question à toute personne qui reçoit le baptême : « Acceptez-vous toute la nouveauté que le baptême apportera à votre vie ? »

Oui, je pense que cette question est vraiment une question que nous pouvons nous poser tous ici : est-ce que j’accepte que le baptême que j’ai reçu (ou que je m’apprête à recevoir) apporte un bouleversement à ma vie ? Est-ce que j’accepte toute la nouveauté que ce baptême apportera chaque jour à ma vie quotidienne ?

Sacrée question ! A priori, ce n’est pas facile de dire oui. Surtout quand on sait que, immédiatement après cet évangile sur le baptême de Jésus, Saint Matthieu mentionnera la tentation au désert ! Toutes les nouveautés ne seront pas forcément agréables, loin de là.

Si nous envisageons la suite du baptême en regardant nos propres forces, alors c’est vrai c’est extrêmement difficile de dire oui à l’inconnu. Mais, si on sait qu’on ne va pas être tout seul, c’est déjà plus envisageable.

Et c’est justement là que tout se joue : le baptême c’est un sacrement, c’est le sacrement de la Foi ! On pense souvent à tort que le baptême est le sacrement de la petite enfance, parce qu’on baptise souvent les nouveaux-nés ; mais non ! Tout ce que nous proclamerons tout à l’heure dans le credo est manifesté dans le baptême. En recevant le baptême, nous montrons que nous avons foi en Dieu, que nous avons confiance en Dieu ; et Dieu de son côté nous montre lui aussi qu’il nous fait confiance.

Jésus ne fait jamais de geste superflu. Comme Jean-Baptiste le montre en voulant l’empêcher de venir dans l’eau, Jésus n’avait pas besoin d’être baptisé. Alors, pourquoi l’a-t-il fait ?

Si Jésus demande à être baptisé, c’est clairement pour montrer un chemin. Jésus a pour mission de montrer la voie à suivre pour renouer l’Alliance d’amour rompue avec Dieu le Père. Parce que c’est le rôle attendu d’un Messie que de rétablir cette alliance brisée. En demandant un baptême dont il n’a pas besoin, Jésus nous invite donc à suivre ses pas.

Etre baptisé, c’est donc suivre les pas de Jésus qui est le Chemin, la Vérité et la Vie. Et ce que nous montre Jésus, c’est que ce chemin est en fait une traversée. La même traversée que celle qu’il fera un peu plus tard en mourant sur la croix pour ressusciter. Oui le baptême annonce une résurrection.

JSeriez-vous d’accord pour un faire une petite expérience d’approche, là maintenant tout de suite ? Je vous invite à vider vos poumons totalement de l’air qu’ils contiennent, et d’attendre quelques secondes en bloquant votre respiration. Puis inspirez l’air à fond dans vos poumons et respirez !

C’est comme si nous plongions dans un fleuve : l’air nous manque pendant la traversée ; nous traversons symboliquement la mort ; et lorsque nous pouvons à nouveau respirer, c’est comme si nous revenions à la vie.

Le baptême, c’est le premier passage de la mort à la vie. Il sera suivi de bien d’autres. C’est un lieu de nouveauté, un départ, un élan, un passage initiatique, une porte vers une vie renouvelée, enrichie de l’intérieur. C’est une Pâque !

Cela va bien au-delà de ce que Jean-Baptiste proposait : Jean-Baptiste, lui, baptisait des gens qui voulaient changer de vie ; ces gens montraient ainsi leur conversion intérieure ; mais tout reposait sur leurs propres forces. Ce que nous montre Jésus, c’est que désormais le baptême est plus qu’un acte de conversion volontaire de notre part ; désormais Dieu nous répond ! Par le baptême, l’Esprit Saint nous rejoint. Le baptême manifeste ainsi que Dieu est avec nous et qu’il nous accompagne. A nouveau, l’Alliance est renouée !

On peut ainsi comprendre pourquoi Jésus dit cette phrase un peu compliquée, lorsque Jean-Baptiste veut l’empêcher de recevoir le baptême : « laisse faire pour le moment car il convient que nous accomplissions ainsi toute justice ».

Ce qui est juste, c’est que chaque être humain puisse vivre avec Dieu.

Ce qui est juste, ce n’est pas que nous puissions rejoindre Dieu avec nos propres forces et que, de ce fait, seuls ceux qui en ont cette force, ceux qui seraient parfaits, purs, impeccables, sans taches, y parviendraient. La justice c’est que toute l’humanité puisse être avec Dieu.

Et c’est donc pour cela que Dieu lui-même fait le chemin afin de nous montrer la bonne voie. Dieu lui-même, par Jésus, vient nous donner la clé de la porte d’entrée vers la vraie vie. Une porte accessible à tous !

Oui, il est juste que chacun entende cette parole fondatrice que Dieu le Père adresse à son Fils « celui-ci est mon Fils bien aimé en qui je trouve ma joie »

Cette phrase que Dieu le Père adresse à Jésus, Il l’adresse aussi, dans les mêmes termes à toute personne qui reçoit le baptême : par le baptême, nous devenons, comme Jésus, les fils et filles de Dieu le Père ; par le baptême, comme Jésus, nous sommes liés d’une manière toute spécifique au Père en recevant l’Esprit Saint.

Nous entrons dans l’amour de la Trinité ; l’amour intense qui circule entre le Père et le Fils nous prend à notre tour.

Alors voyez, le baptême est le premier des sacrements dans l’ordre chronologique, mais c’est aussi probablement l’un des plus essentiels de la vie chrétienne.

C’est la nouvelle année. Permettez-moi de faire un vœu : quel que soit notre nombre d’heures de vol dans le baptême, je nous souhaite de découvrir ou de redécouvrir cette année combien nous sommes des fils et des filles bien aimés de Dieu le Père, combien nous sommes source de joie pour Dieu.

Et que nous puissions désensabler la source de notre baptême, que nous nous lancions vigoureusement dans notre vie de baptisé, cette vie pleine de traversées à faire et pleine de nouveauté ; pleine de nouveauté pour nous, mais aussi, PAR nous et AVEC l’Esprit-Saint et l’exemple de Jésus, pleine de nouveauté pour ceux que nous rencontrons et pour le monde entier.

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