Vous souvenez-vous du film « Des hommes et des dieux », avec Lambert Wilson et Michael Longsdale ? Ce film raconte la vie des moines de Tibhirine en Algérie, leur enlèvement et leur assassinat par un groupe de musulmans fondamentalistes. Le souvenir de ce superbe film m’est venu à l’occasion des évènements qu’a vécu notre capitale la semaine dernière.

Je repense plus particulièrement à la scène où Lambert Wilson, qui incarne le Père Prieur Christian de Chergé, répond à la convocation de l’armée algérienne afin d’identifier le corps d’un des terroristes ; là, devant ce corps abîmé et inerte d’un homme auteur de violences sans nom, ce moine se signe du signe de la croix et prie, suscitant l’incompréhension et même la colère du représentant de l’armée.

Il prie pour ce terroriste ; il prie pour cet homme qui, probablement, l’aurait aveuglément exécuté, comme le groupuscule armé le fera quelques jours plus tard.

Ce moine prie sciemment pour cet ennemi.

Une collègue de travail m’a même rapporté qu’à la vue de ce film, son mari, agnostique, s’est écrié « si c’est ça la foi, ça donne envie d’être catho ! ».

Je crois, effectivement, que cette scène incarne l’attitude vraie du chrétien, et révèle très exactement la dimension de l’amour du Père qu’est venu révéler Jésus : l’amour qu’Il nous porte est un amour inconditionnel, au-delà de toutes les fautes, de tous les vices, de tous les péchés. Il ne légitime pas le péché ; il ne légitime pas le Mal, mais il le combat avec des armes spécifiques.

Jean-Baptiste annonce dans l’évangile de ce jour : « Voici l’Agneau de Dieu ». « Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde ». Voilà donc l’arme de Dieu contre les horreurs du Mal : prendre sur Lui le Mal, ce Mal qui gangrène le monde entier, pour que le monde entier ne soit plus jamais séparé de la source de l’amour.

Face à la forme qu’a pris le Mal ces derniers temps, on entend beaucoup de monde énoncer qu’il faudrait plus de laïcité. Selon ces personnes, la laïcité serait la solution pour que ce genre de drame ne se reproduise plus.

Honnêtement on se demande un peu ce que « plus de laïcité » signifie concrètement, mais surtout, parler de laïcité face à des meurtres semble laisser entendre qu’il y a deux côtés de la barrière : d’un côté les partisans de la tolérance et de la liberté, dotés d’intelligences évoluées ; de l’autre les intolérants, les fanatiques, les intelligences obscurcies, les opinions brimées, les archaïques…

En d’autre termes, les religions, quelles qu’elles soient, fomenteraient potentiellement des terroristes ; il faudrait donc les cacher le plus possible pour les empêcher de nuire à nouveau…

La diversité étonnante du profil des terroristes laisse surtout entendre une perte de sens, à laquelle justement la laïcité ne sait pas répondre.

Comment ne pas voir dans ces jeunes qui, subitement, rejettent leurs parents et amis, s’enrôlent dans des pays lointains, endossent une langue et une culture radicalement différentes de celles qu’ils ont connues, pour aller manier un fusil d’assaut ou une bombe, comment ne pas voir en cela une quête désespérée de sens à donner à leur vie ?

Face à cela, la laïcité est une arme insuffisante et inappropriée ; on ne trouve pas sens à sa vie dans la laïcité ; la laïcité, souvent prise à tort dans le sens d’absence de fait religieux, n’est pas capable de donner espérance à quelqu’un qui désespère.

Ce dont notre monde a le plus besoin, ce n’est pas de plus ou de moins de laïcité. Ce dont notre monde a le plus besoin, c’est de la Foi ! Et d’une Foi vivante ! Pas une croyance vague, superstitieuse ou folklorique qui, finalement ne fait que glisser sur notre être sans y trouver prise ; mais bien une Foi qui prend aux tripes, qui nous rend vivants et féconds, une Foi qui bouleverse notre être profond tant elle répond à notre quête de sens et ouvre des horizons totalement inattendus parce qu’infinis !

Une Foi vivante, mais aussi une Foi dans le vrai Dieu !

Nous avons besoin, plus que jamais, d’entendre Jean-Baptiste dire : « Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde ». Jean-Baptiste nous dit que Jésus est celui qui éradique du monde tout péché ! Nous avons besoin qu’on nous montre le vrai visage de Dieu, ce Dieu porteur de vie et de paix, ce Dieu qui permet au divin et à l’humain d’être indéfectiblement liés dans une relation d’amour, sans aucune possibilité de reniement, ce Dieu qui combat le Mal, qui le combat par l’Amour, qui le combat jusqu’à souffrir, jusqu’à mourir !

Et ce visage, nous croyons que c’est celui de Jésus : le visage de Jésus, c’est celui de Dieu ! Ses gestes sont ceux de Dieu ! Sa Parole est celle de Dieu incarné !

Oui, qu’on nous montre Dieu tel qu’il est vraiment ! Est-ce une idéologie, est-ce un agir moral, une pratique, un rituel ? Tout cela a son importance mais reste franchement secondaire ; Jean-Baptiste ne nous montre pas un savoir : il nous introduit vers une personne, vers ce Jésus porteur de vie et de paix.

Ecoutons la question de Jésus aux deux disciples : « Que cherchez vous ? ».

Oui : que cherchons-nous ? Quelle est notre quête profonde ? Quelle est notre attente proprement existentielle ? Qu’est ce qui nourrira la totalité de notre être, corps, affectivité et cœur profond ?
C’est bien à ce niveau de profondeur que se vit cette rencontre à laquelle nous assistons entre Jésus et les deux disciples.

« Venez et vous verrez. » répond Jésus. C’est un peu comme si Jésus leur disait :

Moi Jésus qui suis le Chemin la Vérité et la Vie, je peux vous donner cette vie, je peux étancher votre soif ; je vais me donner à vous, moi, la clé-même de la vie.

C’est librement que nous pourrons faire alliance.

Je ne vous propose pas un esclavage déshumanisé qui mène à la mort.

Je vous propose au contraire une relation libérante avec votre Créateur, divinisant votre humanité et vos relations avec tous les hommes et vous menant vers un surcroît de vie.

Viens et vois.

J’appelle, je ne m’impose pas.

Mais si tu te rends disponible, si tu m’invites chez toi, comme Samuel le fait en disant « Parle Seigneur, ton serviteur écoute », si tu viens découvrir qui est vraiment le Seigneur, alors tu t’enthousiasmeras comme André : tu t’empresseras de transmettre ta découverte à ceux qui t’entourent !

Et la merveilleuse nouvelle qui a répondu à ta quête profonde se déploiera dans le monde entier aussi vite que sur n’importe lequel des réseaux sociaux d’aujourd’hui.

Amen

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