Dimanche dernier, le Stade Rennais a perdu son match de foot face à Reims 2 à 1. Notre curé oscillait entre colère et désespoir. Il enrageait contre cette équipe qui, si elle a dominé le match, s’est pris 2 buts adverses, tels des bouchons de champagne en plein visage… Il a crié, il s’est révolté, il a imploré, il a pleuré… Mais il a fini par accepter l’inacceptable, traversant successivement toutes les étapes de ce qui s’apparente à un deuil.

Pour essuyer la honte qui rougissait son front de supporter abandonné, et lui redonner son sourire légendaire, l’espérance de jours meilleurs que lui donne la foi en Christ l’a beaucoup aidé. Mais s’il peut aujourd’hui présenter à nouveau ce visage radieux, c’est aussi, j’en suis persuadé, grâce à vous, grâce aux liens qu’il entretient avec les petites brebis que nous sommes, et dont il est (pour encore quelques mois) le pasteur.

La vie a repris et c’est heureux. Cependant, que ce serait-il passé s’il avait été seul ? Aurait-il remonté la pente aussi vite ?

Combien d’évènements douloureux traversons-nous nous-mêmes pour lesquels la présence d’un ami est réconfortante ! La pire des choses que nous puissions vivre dans les moments difficiles n’est-elle pas l’isolement ? La solitude totale et subie ?

En prison, les situations les plus dures consistent bien à être mis à l’isolement. Quand on est réfugié, la part douloureuse est non seulement la coupure forcée d’avec nos racines, d’avec notre ancien lieu de vie, d’avec ceux qu’on aime, mais aussi la difficulté qu’on aura de tisser de nouveaux liens avec notre nouvel environnement. Si nous sommes malades, quoi de plus triste que de rester seul à l’hôpital, sans visite ? Et dans notre vieillesse, n’aurons-nous pas besoin de la douceur de la présence de quelqu’un à qui parler, avec qui échanger ?

A l’inverse, avoir du prix aux yeux de quelqu’un, entretenir un lien de profonde confiance avec quelqu’un, avoir un ami, s’aimer entre époux, s’aimer en famille, compter pour quelqu’un et montrer à quelqu’un qu’il peut compter sur nous, tout cela nous met en joie, tout cela donne du prix à la vie. Nous sentons bien que nous sommes faits pour cela : être liés, reliés, alliés les uns aux autres. Être en… communion ? Tout cela rend vivant, tout cela est porteur de vie.

Eh bien voilà : nous venons de comprendre ce qu’est la Sainte Trinité !

Sentez-le : les liens nous libèrent lorsqu’ils nous accomplissent : donner, se donner, recevoir le don d’un autre, c’est permettre de créer un lien passionné, amoureux ou fraternel, une relation qui libère l’amour, qui le fait jaillir et qui de ce fait nous élève, nous grandit, donne sens à notre petite vie.

En réalité, ce que nous percevons dans nos relations n’est pas autre chose qu’un reflet de ce que Dieu vit en lui-même.

Dieu est Amour ! Il est amour pour les hommes, comme le disent les juifs ou les musulmans, mais pas seulement : nous, chrétiens, nous disons qu’il est Amour en lui-même : un père donne l’amour à son Fils, le Fils reçoit cet amour et le propage, et cet amour est un lien tellement consistant qu’il en est une personne : l’Esprit-Saint. Parce que nous sommes créés à l’image de Dieu, alors nous sommes faits pour vivre en relation ; ou plus justement : nous sommes faits pour être des relations. J’ai lu quelque part : « la solitude n’est pas divine, donc elle n’est pas humaine ».

Nous ne sommes pas faits pour rester seuls. Un tel vide serait, me semble-t-il, le véritable enfer. L’Enfer, lieu du néant, de l’absence de vie, lieu de la désespérance totale et de la solitude la plus intense et la plus profonde.

Alors, entendons la promesse que nous fait Jésus dans l’évangile de ce jour : « Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde »… Entendons bien cette phrase ! Jamais nous ne serons orphelins, esseulés, abandonnés. Il y a à chaque instant quelqu’un qui nous aime, dès maintenant et sans rupture. Quelqu’un qui est 100% humain et 100% divin, quelqu’un qui fait partie, avec sa nature humaine, de cette circulation d’amour qui caractérise et constitue Dieu. A chaque seconde que nous vivons, Dieu nous invite à partager son intimité, à goûter comme Jésus à l’amour qu’il donne à profusion à chacun de ses enfants en tant que Père. L’amour trinitaire nous accueille en son sein.

Quoi de plus naturel alors de rechercher et de trouver du bonheur dans les liens que nous entretenons. Ils sont un reflet de l’Amour véritable ! Et le deuxième effet kiss cool de la Trinité, c’est l’incarnation de Dieu en Jésus : elle nous a rendus capables de propager cette Trinité par nos actes et nos choix, à n’importe quel moment, dans nos vies personnelles, dans nos vies professionnelles…

Alors, la prochaine fois que vous aurez quelqu’un à côté de vous, dites-vous que vous êtes chacun l’un pour l’autre des êtres trinitaires : par les liens que vous nouez entre vous (qu’il s’agisse d’un match de foot, ou d’un déjeuner entre collègues de travail), vous permettez à l’Esprit-Saint de continuer à toucher terre et, ainsi, à la promesse de Jésus de s’accomplir : « Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde ».

Ainsi, plus personne ne sera seul, et le monde vivra pleinement sa vocation de sainteté.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.